Une douce chose par Steve Lefkowitz

[VIDEO][POEME] [REDIFF – Spectacle de mars 2018 à la Lanterne – Rambouillet]

Une douce chose par Steve Lefkowitz, mise en scène Bruno de Saint-Riquier, réalisation Olivier Sochard

S’agissant de l’amitié, le poète place la barre très haut. A l’ami véritable, il suffit, d’après La Fontaine, d’avoir rêvé – non pas constaté ni appris, juste rêvé – que l’autre est triste. Alors, pour lui remonter le moral, l’ami est prêt à se battre jusqu’à la mort, à vider son compte en banque, à lui livrer sa femme.

Beaucoup d’histoires font un tel portrait d’une amitié profonde, pure, infaillible : Elie et Ali, Achille et Patrocle, David et Jonathan. « … un ami véritable est une douce chose ! » Oui, mais, dans la vie, si on sort du doux chemin des rêves, débouche-t-on forcément sur l’amertume de la déception ? A travers des histoires tirées de textes et de sa vie personnelle, Steve Lefkowitz pose cette simple question pour interroger nos si confondantes contradictions humaines.

Les deux Amis [Fable, Jean de La Fontaine] … poème d’ouverture du spectacle « Une douce chose » par Steve Lefkowitz, mise en scène Bruno de Saint-Riquier

Deux vrais amis vivaient au Monomotapa :
L’un ne possédait rien qui n’appartînt à l’autre :
Les amis de ce pays-là
Valent bien, dit-on, ceux du nôtre.
Une nuit que chacun s’occupait au sommeil,
Et mettait à profit l’absence du soleil,
Un de nos deux Amis sort du lit en alarme ;
Il court chez son intime, éveille les Valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L’ami couché s’étonne, il prend sa bourse, il s’arme ;
Vient trouver l’autre, et dit : Il vous arrive peu
De courir quand on dort ; vous me paraissez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme :
N’auriez-vous point perdu tout votre argent au jeu ?
En voici. S’il vous est venu quelque querelle,
J’ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul ? Une esclave assez belle
Était à mes côtés ; voulez-vous qu’on l’appelle ?
Non, dit l’ami, ce n’est ni l’un ni l’autre point :
Je vous rends grâce de ce zèle.
Vous m’êtes en dormant un peu triste apparu ;
J’ai craint qu’il ne fût vrai, je suis vite accouru.
Ce maudit songe en est la cause.
Qui d’eux aimait le mieux ? Que t’en semble, lecteur ?
Cette difficulté vaut bien qu’on la propose.
Qu’un ami véritable est une douce chose!
Il cherche vos besoins au fond de votre coeur ;
Il vous épargne la pudeur
De les lui découvrir vous-même.
Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s’agit de ce qu’il aime.


Pour aller plus loin : Portrait de Steven Lefkowitz

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